Lean & Green

Livrer le client quand il a besoin des produits, avec la bonne quantité et qualité avec un processus frugal est la STRATÉGIE.

La terre a déjà tiré l’andon.

La seule cause qui doit mobiliser toutes les ressources est clairement la réduction de notre impact sur cette planète irremplaçable qui soutient notre existence.

On entend beaucoup dire que les causes principales de l’échec à faire bouger les choses viennent des lobbies et de la course aux profits. Ces mots sont pour certains devenus synonyme du mal absolu. Et pourtant, il suffit d’ouvrir un média ou un livre de développement personnel pour comprendre que chacun d’entre nous aspire chaque jour à mieux profiter de sa vie, de sa retraite, de son entourage… On comprend alors pourquoi le peuple descend dans les rues bien plus souvent mobilisé contre une modification réglementaire que pour demander une loi sur l’écologie et que la plupart des revendications portent plus sur l’augmentation du pouvoir d’achat que sur la minimisation de l’impact environnemental.

Sommes-nous si différents de ceux que nous critiquons ?

Le mot “profit” ruine ma sérénité car il sous-entend que l’on tire avantage de quelque chose ou de quelqu’un. Et cependant, ne rien faire me fatigue car cela fait porter à d’autres les actions nécessaires et rétrécit notre responsabilité et notre indépendance.

Jean-Claude BIHR

Je ne pense pas que nous soyons nés pour profiter de quoi que ce soit.

Je crois que nous habitons le “système terre” pour l’améliorer et surtout pas pour l’exploiter. Nous pouvons l’utiliser dans tout ce qu’il a de renouvelable, mais nous devons aussi le protéger. Si tel n’est pas le cas, alors la définition de l’homme devient exactement celle du parasite ce qui est simplement insupportable. La première des protections consiste à limiter notre pollution car si les ressources sont pour la plupart finies, elles sont encore énormes et les premières crises environnementales liées à la pollution arriveront bien avant les pénuries.

Le défi de toute société industrielle est donc bien de réduire ses émissions et nous devons collectivement tendre vers une société qui émet le moins possible.

Bref, la terre a tout d’abord un besoin urgent de 5S.

L’industrie au sens large a évidemment une place majeure dans la résolution de ce problème et donc les stratégies à venir de développement du business vont être au cœur du problème et de la solution. La stratégie de business que j’ai choisie pour la société est le lean et il m’est apparu fondamental de me demander tôt si le lean était soluble dans le green (système de développement socio-économique durable qui répond aux besoins du présent sans compromettre la capacité des générations futures de répondre aux leurs).

Lorsque que l’on étudie de près les fondamentaux du lean, on se rend vite compte que la réduction des gaspillages est bio-compatible avec un objectif de minimisation des émissions. Le lean & green manifesto exprime clairement ces concepts.

Mais est-ce suffisant ? Ou bien n’est-ce qu’un acte de bonne conscience qui voit l’écologie au travers du lean comme Mr Jourdain envisage la poésie ?

En fait, le lean est la seule stratégie de business qui s’engage globalement sur la réduction des gaspillages et des pollutions, qui prend en compte la conception des produits ainsi que les gens qui les achètent et les créent. C’est la seule stratégie de business de long terme qui met l’amélioration continue au cœur de tout.

Lorsque que Sakichi Toyoda a créé son métier à tisser modèle G, il ne visait pas les quelques années qui suivaient mais clairement bien plus loin. Car toute la difficulté est là. Quand on vit une période où l’on dépense l’argent que l’on n’a pas encore gagné ou que l’horizon est la prochaine cotation ou la prochaine élection, il est difficile de prévoir et d’accepter des changements qui affecteront des gens dont nous ne connaissons pas encore les parents.

Le lean a le courage des changements longs, des changements qui modifient les pratiques et les hommes qui les utilisent, c’est un modèle qui porte cet engagement.

Paradoxalement, c’est en maitrisant et réduisant ses lead time que l’on est capable, par la résilience et l’autonomie créées, d’intégrer sans peur les temps longs. La stratégie du temps long est une condition.

Le lean est la seule stratégie qui systématise le progrès vers la réduction des impacts environnementaux car c’est le seul modèle dont le socle est basé sur la responsabilité. « Green » peut se traduire par responsabilité environnementale mais aussi par responsabilité sociétale ce qui inclut un périmètre bien plus large. Et cela fonctionne depuis sa création par un processus digital cohérent avec l’environnement qui, grâce au kanban n’extrait que la valeur nécessaire et au bon moment. Chaque carte kanban est un pixel ou un bit de valeur, la quantité minimale utilisable vis à vis du besoin et c’est en cela que le lean est l’avenir du green.

Comme beaucoup, j’ai introduit cette stratégie dans la société et cela a été fait avec un certain succès.

Loin d’un gain d’ordre 10 comme l’annonce Taiichi Ohno mais l’entreprise réalise des profits en produisant en France des produits métallurgiques ce qui n’est pas une évidence.

Vu de loin notre usine tourne comme une usine Toyota. Vu de près aussi. Tous les outils sont là. Ils sont utilisés. Et pourtant je suis déçu. Parce qu’en visitant les usines Toyota du Japon, on ressent une toute autre impression.

On constate que la qualité est totale alors qu’elle n’est qu’approximative chez nous, Là-bas les réglages n’existent pas, tout fonctionne vraiment du premier coup, et les livraisons se font à l’heure. Il faut apprendre à voir et c’est pour cette raison que j’ai visité personnellement de nombreux sites du constructeur. Nos sens nous trompent. Toyota met en garde très tôt vis à vis des “misconceptions” et une leçon est qu’il ne faut pas seulement regarder mais écouter car ils expliquent clairement ce qu’ils cherchent à faire et pourquoi.

C’est nous qui n’écoutons pas.

L’essence du système, ce sont les camions qui viennent chercher les pièces à intervalle régulier. Ce n’est pas l’aboutissement d’une production c’est la condition. Ce n’est pas en visitant Toyota que l’on comprend, c’est en visitant ses fournisseurs. Là, il n’est question que de ces camions de prélèvement et tout le monde dans l’usine sait exactement combien de camions passent par jour et quand le prochain va arriver. Quand votre survie est dictée par un takt de camion que vous n’avez pas le droit de rater sous peine d’être sorti du panel, quand il faut remplir ce camion à l’heure avec la bonne quantité et une grande variété de produits bons, on comprend mieux tout le reste. On comprend les changements rapides, on comprend la formation du personnel, on comprend l’obligation d’éliminer tout ce qui se met en travers de ce chemin.

En fait le lean, ce n’est qu’une histoire de camion. C’est brutal, rigoureux, huilé et terriblement efficace.

Comment cela se traduit :

Les développements sont pilotés par les A3 et la résolution de problèmes en collaboration avec le client

La qualité est pilotée par l’Andon

Les livraisons clients sont cadencées par le Kanban et le petit train

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